L'armée de l'air a « un fort enjeu de recrutement, mais aussi de fidélisation » © Armée de l'air

L'armée de l'air a « un fort enjeu de recrutement, mais aussi de fidélisation »


Propos recueillis par Helen Chachaty
| 20/06/2019 | 1211 mots | AEROCONTACT | EMPLOI & CARRIÈRE

Alors que le Salon du Bourget ouvre ses portes au grand public le 21 juin, avec une journée dédiée aux étudiants, l'armée de l'air lancera une nouvelle prise de parole - affichage numérique et papier, spots TV - du 23 juin au 3 juillet prochain. Le Journal de l'Aviation s'est entretenu avec le directeur des ressources humaines de l'armée de l'air, le général Alain Ferran, afin d'évoquer les enjeux actuels de recrutement.

Quelles ont été vos premières priorités en arrivant à la tête de la DRHAA il y a quelques mois et comment les mettez-vous en oeuvre ?

Depuis 2015, nous avons complètement inversé la donne. Il s'agit avant tout de faire remonter les effectifs. Cette année, nous devrions recruter plus de 3 500 aviateurs, dans toutes les catégories de métiers. La Loi de programmation militaire ouvre sur de nouveaux métiers, le cyberespace et bientôt au sein de l'espace exo-atmosphérique, renforce la place du renseignement, voit l'arrivée de nouveaux matériels comme le MRTT, le PC-21, les drones Reaper ou les ALSR. Le recrutement a un objectif certes quantitatif, mais aussi qualitatif, avec des compétences plus pointues.

Pour arriver à recruter, il faut disposer d'une chaîne de recrutement professionnalisée et renforcée, pour permettre de faire face aux flux. Il faut également innover. Il ne s'agit plus de publier une annonce et d'attendre, il faut aller chercher les candidats.

Nous sommes en train de mettre en place avec l'armée de terre et la marine nationale le projet Sparta, un nouveau système d'information, pour accroître la performance de la chaîne de recrutement. Ce projet interarmées est mené par l'armée de terre et devrait être mis en service à l'horizon 2020-2021. Il permettra d'accompagner et de suivre les postulants de manière plus fine, en proposant des métiers sur lesquels ils pourront postuler en fonction de ce qu'ils auront fourni comme informations quant à leurs diplômes, leur niveau de formation, leurs envies.

Quels sont les profils auxquels vous devez porter attention actuellement ?

Nous maintenons une vigilance vis-à-vis des personnels navigants. Nous arrivons à recruter, mais nous faisons face actuellement à ce qu'on appelle « l'effet cohorte ». Ce sont des pilotes officiers sous contrat recrutés au début des années 2000 et qui arrivent en fin de parcours, ce qui va mécaniquement nous obliger à recruter à des volumes plus élevés. Cette année, nous prévoyons de recruter une centaine d'élèves officiers pilotes, alors que nous étions plutôt autour de 80 l'année dernière.

Outre ces départs inéluctables, il faut également compenser les départs liés à l'attractivité des compagnies aériennes. Si pour les pilotes de chasse, la manoeuvre RH nécessite seulement de comblet les départs, pour les pilotes de transport, il faut prendre en compte l'augmentation des besoins, liée aux nouvelles plateformes. Nous devons donc mettre les bouchées doubles en termes de recrutement et de formation. L'objectif est d'avoir 50 pilotes de transport nouvellement formés par an, contre 37 pour la chasse.

Nous avons par ailleurs réactivé le partenariat avec Air France en 2017, en élaborant une liste des officiers en fin de parcours qui pourraient rejoindre la compagnie. Aujourd'hui, le partenariat a conduit au recrutement de neuf PN aviateurs. En contrepartie, Air France s'engage à ce qu'il n'y ait pas de pilotes non-inscrits sur la liste qui soit pris au sein de la compagnie. Cela permet de donner de la visibilité à tout le monde.

La concurrence est également forte sur les métiers du MCO aéro.

Nous devons arriver à recruter dans un contexte de reprise économique, notamment dans les métiers sur lesquels l'armée de l'air est en concurrence avec le civil, les grands groupes industriels. Nous discutons avec certains afin de nous entendre sur le moment où les personnels vont « changer de maison », car nos aviateurs ont des compétences très recherchées par nos partenaires civils. Si les mécaniciens sont en fin de contrat, nous essayons de les accompagner dans la reconversion, mais nous sommes plus réticents lorsque le départ s'effectue en milieu de parcours, alors qu'ils viennent d'être formés et qu'ils sont opérationnels. C'est un dialogue qui doit se poursuivre pour le bénéfice de tous, en partenariat avec les autres acteurs de la filière.

Au-delà du recrutement, qu'en est-il de la fidélisation de vos personnels ?

Nous avons un fort enjeu de recrutement, mais également de fidélisation. Celle-ci passe par exemple par la formation. Les jeunes sont maintenant habitués au fait numérique et nous sommes en train de changer toute notre méthode de formation, à l'image du projet Smart school, qui vise à numériser la formation. Nous souhaitons également minimiser les temps de formation pour gagner du temps opérationnel, ce qui peut permettre de gagner en fidélisation, en évitant une baisse de la motivation. Nous faisons également venir des unités opérationnelles en école, et les stagiaires vont à leur tour témoigner de leur formation à l'extérieur. C'est un cercle vertueux au bénéfice de l'attractivité.

Nous disposons également de nouveaux outils en termes de rémunération. L'indemnité de mise en oeuvre de maintenance des aéronefs a par exemple été augmentée il y a deux ans. Nous allons également disposer d'une nouvelle prime, qui sera mise en oeuvre fin 2019 : la prime de lien en service. Celle-ci permettra de pouvoir donner, en contrepartie d'un engagement de lien au service, une somme conséquente (jusqu'à 25 000 euros sur une carrière) à un aviateur dans une spécialité en tension, que ce soit en une seule ou plusieurs fois.

Mais la fidélisation, ce n'est pas que de la rémunération, c'est aussi le plan familles, l'amélioration de la condition de l'aviateur... Il faut donner de la visibilité, minimiser les conséquences de la mobilité. A termes, ces petites rivières feront le fleuve de la fidélisation.


 

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